13 octobre 2022

Dans les coulisses de la Coupe du Monde au Qatar 2022

Dans quelques semaines, une nouvelle période de folie footballistique va éclater. L'un des événements sportifs les plus controversés ces dernières années. A l'approche de cette Coupe du monde qui aura lieu au Qatar, les avis divergent : certains bars sportifs annoncent qu'il ne diffuseront pas les matchs, d'autres porteront des chemises noires en guise de protestation contre son équipe nationale, etc. Que se passe-t-il réellement avec cette Coupe du monde au Qatar ?


Tout a commencé lorsque la Coupe du monde a été attribuée à ce petit État du Golfe, il y a 12 ans. Le Qatar a remporté le prestigieux tournoi en y injectant beaucoup d'argent. Pactole reçu par certains acteurs de premier plan au sein de la FIFA : une fraude, en d'autres termes. Le Qatar étant régulièrement mis en cause pour des violations des droits humains, le choisir comme pays hôte a suscité de nombreuses interrogations. En raison du climat extrêmenent chaud et sec de l'État du Golfe, l'organisation et la préparation de la Coupe du monde ont un impact environnemental et climatique considérable, d'énorme quantités d'eau et d'énergie sont nécessaires pour maintenir le gazon vert et les stades suffisamment frais. 

Système de la Kafala

Le Qatar a dû construire des infrastructures sportives et hôtelières supplémentaires et même des villes supplémentaires pour accueillir et organiser la Coupe du monde laissant déjà des traces d'abus, de dégâts et d'exploitation. Le journal The Guardian affirme que plus de 6.750 travailleurs migrants originaires, entre autres, d'Inde, du Pakistan, du Népal, du Sri Lanka et du Bangladesh sont morts pendant la construction. Un nombre considérable d'ouvriers du bâtiment - des hommes jeunes et en bonne santé - sont morts subitement d'insuffisance cardiaque et pulmonaire. Le Qatar nie qu'il s'agisse d'accidents du travail, car les victimes sont mortes à côté des chantiers de construction. Cependant, c'est sur ces chantiers que les travailleurs de la construction ont continué à travailler pendant des jours et des jours sous une chaleur accablante, malgré une interdiction de travailler pendant les heures les plus chaudes de la journée. De plus, le Qatar a mis en place un système de parrainage, appelé le système de la kafala, qui lie légalement les travailleurs migrants aux personnes qui les embauchent. Point de départ de cet esclavagisme moderne. En efet, ce système empêchait les travailleurs de changer d'emploi ou de quitter le pays sans l'autorisation de leur employeur : ils étaient donc coincés et avaient peu de droits. Maintenant que les hôtels et les stades sont là, de grands groupes de travailleurs migrants vont à nouveau se mettre au travail pour gérer les hôtels (agents de sécurité, hôtesses, etc.), nettoyer les chambres (travailleuses domestiques) et offrir l'hospitalité et le confort que les visiteurs internationaux attendent. Ce sont principalement des femmes qui occuperont ces emplois. Sachant qu'elles sont d'autant plus vulnérables lorsqu'il s'agit de comportements transgressifs au travail.

Unir les forces

Les syndicats nationaux et internationaux et les ONG ont accompli un travail titanesque ces dernières années pour contrer les violations et réparer les abus. Les syndicats des pays de départ, comme le syndicat népalais GEFONT (voir ci-dessous), ont aidé les personnes avant et après leur départ par des conseils et une assistance en les organisant également au Qatar, malgré l'interdiction des syndicats dans ce pays. La Confédération syndicale internationale (CSI) a mené, pendant trois ans, des pourparlers avec la FIFA, qui ont malheureusement abouti à trop peu de changements concrets. Ils se sont ensuite rendus dans les camps de travail au Qatar pour recueillir des témoignages, que les avocats ont utilisés pour travailler. Cependant, le système juridique corrompu a constitué un obstacle et le gouvernement qatari n'était pas disposé à discuter, de sorte que l'information a été rendue publique par une publication et une plainte déposée auprès de l'Organisation internationale du travail (OIT). Finalement, le Qatar s'est engagé à modifier la législation du travail, ce qui a conduit à la fin du système de kafala, à l'instauration d'un salaire minimum pour les travailleurs migrants, de comités de travailleurs et de tribunaux du travail. Le système n'est pas parfait, mais le droit du travail est désormais en place. Le grand défi consiste à les mettre en œuvre et à les faire respecter, même et surtout lorsque, après la Coupe du monde, le monde n'aura plus les yeux rivés sur le Qatar et que l'indignation et la pression internationales s'estomperont. 

Règles du jeu pour les entreprises

Il est important de ne pas considérer le Qatar comme l'exception à la règle. Les événements (sportifs) internationaux de ce type nécessitent toujours des préparatifs à grande échelle et souvent des infrastructures supplémentaires. Ce sont souvent des migrants qui sont recrutés pour effectuer ce travail supplémentaire, mais ils ne peuvent souvent pas compter sur la gratitude ou sur un traitement respectueux à leur arrivée. Les salaires restent extrêmement bas, la sécurité vraiment limitée et l'exploitation est réelle. En Belgique et dans plusieurs autres pays européens, la pression se fait de plus en plus forte sur nos décideurs politiques pour qu'ils adoptent une loi obligeant les entreprises à assumer la responsabilité de leurs activités commerciales, même si celles-ci ont lieu dans un autre pays qui ne protège pas suffisamment ses propres résidents travailleurs, comme le Qatar, par exemple. S'ils décident de bafouer les droits des travailleurs ou les normes environnementales, ils pourraient ainsi être sanctionnés par les tribunaux internationaux. C'est ce qu'on appelle le devoir de vigilance des entreprises. La Coupe du monde au Qatar montre qu'une telle législation est indispensable. WSM veut qu'une Coupe du Monde puisse être une véritable célébration du sport, tant pour les personnes devant que dans les coulisses. 

Smritee Lama est secrétaire nationale du syndicat népalais GEFONT. GEFONT est une organisation partenaire respectée de WSM et de la CSC. En octobre dernier, Smritee Lama a été accueillie par WSM en Belgique. Lors de divers séminaires, conférences, ciné-débats, interviews méditaiques, etc. ea témoigner de toute cette réalité au Qatar. Voici son message aux footballeurs et aux supporters. Smritee : "Mon plus grand souhait est que toutes les équipes de football du Qatar jouent bien et gagnent. Je suis moi-même un fan de football : c'est le seul sport dont je comprends les règles. (rires) Je soutien aussi le sport. Je veux partager mon plaisir avec le respect des droits des travailleurs. Ainsi, lorsque vous entrez dans un stade en tant que joueur ou supporter, sachez qu'il a été construit grâce à la vie des travailleurs migrants. Respectez la vie de ces personnes. Respecter leur travail, qui s'est déroulé dans des conditions très difficiles. Et respectez aussi les travailleurs migrants dans votre propre pays."


Photo en haut © Flickr | ILO Apex Image
Photo Smritee Lama © Guy Puttemans | WSM

 

Share


News

EN ES FR NL
Nous découvrir S'informer Agir ensemble Notre réseau Agenda Fais un don

Offres d'emploi Actualités Newsletter Contact