Voilà plusieurs mois que le monde est sous l’emprise du coronavirus. Les médias continuent de nous montrer des images d'unités COVID-19 surpeuplées, d’agents de santé épuisés et de graphiques de nombres croissants et décroissants. Des mesures ont été prises pour empêcher la propagation du virus. Les gens sont priés de rester à la maison et, si possible, de travailler à domicile.
De plus en plus de cas de COVID-19 sont également signalés dans nos pays partenaires en Afrique. Les gouvernements sont rapidement intervenus dès que les premiers cas ont été signalés à l'intérieur des frontières de leurs pays, parfois même avant cela. Les écoles, les marchés et les magasins ont été fermés et les grands rassemblements ont été interdits. Les gens sont invités à se laver les mains, à tousser et à éternuer dans leur bras et à trouver rapidement un médecin en cas de fièvre.
Mais que se passe-t-il si vous ne pouvez pas payer la consultation d'un médecin, surtout maintenant que vous avez dû fermer votre magasin ? Peut-être que vous pouvez vous permettre de payer la consultation, mais qu'en est-il des médicaments ou d'une éventuelle hospitalisation ?
Nos partenaires mutualistes luttent depuis des décennies pour des soins de santé abordables et de qualité pour toutes et tous. Pas toujours évident si l'on considère que dans nos pays partenaires, en moyenne, à peine 20% de la population bénéficie de la sécurité sociale. Les travailleur.euse.s de l'économie informelle et du secteur agricole n'ont souvent pas accès au système ordinaire, mais peuvent réduire leurs frais de santé grâce à de petites contributions à une caisse d'assurance maladie locale. Par exemple, les personnes qui présentent des symptômes suspects peuvent consulter un médecin sans soucis financiers.
Cependant, le rôle de ces mutuelles ne se limite pas à l'assurance maladie. Elles jouent également un rôle très important dans la sensibilisation et la prévention. Elles mettent en place des campagnes pour que chacun ait accès à des informations sur la prévention des maladies. Par exemple, nos partenaires mutualistes distribuent désormais des affiches sur les mesures de prévention concernant le corona. L'UTM (Union technique de la Mutualité), notre partenaire au Mali, a traduit les mesures dans différentes langues locales et utilise des pictogrammes pour que chacun puisse comprendre et appliquer les mesures d'hygiène. Le GRAIM (Groupe de Recherche et d'Appui aux Initiatives mutualistes), notre partenaire au Sénégal, organise des émissions de radio sur une radio locale de jeunes avec un artiste de renom. De cette façon, ils peuvent aborder le thème pour un public difficile à atteindre autrement.
De plus, les mutuelles constituent également un lien idéal entre le gouvernement et la population. En tant qu'organisations de la société civile, les mutuelles sont beaucoup plus proches des populations. Elles savent ce qui se passe, ce qui fonctionne et où se situent les difficultés. Elles peuvent l'utiliser sur des plateformes (locales) de consultation pour endiguer la crise. Par exemple, DynaM (Dynamique Mutualiste), notre partenaire en Guinée, les a intégrées au "comité régional COVID-19" à Mamou. Ce comité assure la coordination et l'évaluation de la mise en œuvre des mesures sanitaires.
Les mutualités sont également des canaux idéaux pour que le gouvernement transmette des messages à la population. Par exemple, notre partenaire GRAIM partage régulièrement des messages du ministère de la Santé sur sa page Facebook. En RD du Congo, où la confiance dans le gouvernement a faibli après plusieurs messages contradictoires sur des cas connus dans le pays, les mutuelles sont considérées comme une source fiable d'informations.
En s'organisant au niveau régional, voire national, les mutuelles prennent de plus en plus le rôle de chiens de garde. Elles peuvent signaler les difficultés, les besoins urgents en équipements de protection supplémentaires, les structures de santé qui ne respecteraient pas les mesures. Elles utilisent ces connaissances pour influencer les autorités locales, régionales et nationales afin que la politique soit adaptée aux réalités de la population. Les plateformes nationales, par exemple, font pression sur leurs gouvernements pour qu'ils prennent les bonnes mesures dans la lutte contre cette pandémie. En assumant leur rôle d'organisations de la société civile, elles démontrent leur valeur ajoutée et s'efforcent de devenir un acteur reconnu dans la mise en œuvre de la politique gouvernementale.
Depuis longtemps, de plus en plus de pays africains reconnaissent l'importance de l'accès à des soins de santé abordables et de qualité pour toutes et tous. Mais passer de la théorie à la pratique ne semble pas évident. Toutes les actions que les mutualités entreprennent maintenant dans la lutte contre cette pandémie, depuis la sensibilisation de la population jusqu'au plaidoyer auprès du gouvernement pour des mesures appropriées, font partie du fonctionnement quotidien de nos partenaires mutualistes. Cette crise du corona confirme une fois de plus la valeur ajoutée des mutuelles. Il est donc clair que cette pandémie ne doit pas seulement inciter à l'aide humanitaire pour venir en aide à ceux qui en ont besoin. Une approche structurelle, où l’on développe une protection sociale durable, est également nécessaire pour réduire l'impact des pandémies à l'avenir.
Écrit par Laure Speecke, service Coopération internationale de la Mutualité Chrétienne nationale
PhotoCover: ©UTM Mali